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Il semble à première vue évident que la température de l’eau que l’on utilise pour infuser notre café à un impact sur le goût de la dite infusion.
Cependant, il persiste toujours des méconnaissances sur la relation entre la température de l’eau les conséquences dans la tasse, mettons un peu d’ordre dans tout ça :
Les facteurs principaux que la température de l’eau impacte sont :
- La quantité d’extraction totale
- La quantité de sucres extraits
- La rapidité d’infusion
“Café bouillu, café foutu !”
On l’a tous déjà entendu une fois dans notre vie de la part d’une grand-mère ou d’un collègue.
Sauf que c’est faux !
Le café est torréfié à des températures au-delà de 180°C, il est donc peu concevable que nos pauvres 100°C (que l’on atteint jamais en réalité lors de l’infusion) puisse “cramer” quoi que ce soit durant l’infusion.
Si nos ancêtres ont déclaré cette règle, c’est parce qu’avec du café torréfié à l’ancienne, si on utilise de l’eau trop chaude pendant trop longtemps, on sur-extrait un café déjà très soluble grâce à une torréfaction poussée et on obtient donc une trop grande quantité de composés amers, plus éventuellement les arômes de brûlé, fumé, etc…
En réalité, si vous préparez du café torréfié entre medium et light, je vous encourage à utiliser la température la plus haute possible, oui, même bouillante.
Il en va de même si votre café du moment est composé de certaines variétés d’arabica très denses comme les variétés typique du Kenya, les SL28 et SL32. Ces grains sont si denses que même après une torréfaction poussée, il faut beaucoup de pouvoir solvant pour en tirer leur plein potentiel d’arômes.
Utiliser de l’eau bouillante, c’est aussi la certitude que notre eau est exactement à la même température à chaque essai, pas de doute possible, si ça bout, c’est à 100°C. Et la stabilité, ici, on aime ça.
Torréfaction | |||
Méthode | Légère | Moyenne | Poussée |
Espresso | 96 | 94 | 90 |
Filtre | 98 | 92 | 80 |
A froid | 18 | 18 | 4 |
L’eau et son pouvoir solvant
L’eau, notre solvant, est bien plus puissante sur la plupart des composés aromatiques lorsqu’elle est chaude. Cela permet donc de maximiser l’extraction des flaveurs et du corps.
Le meilleur moyen de le visualiser, c’est avec du sucre.
Si on verse sur du sucre de l’eau froide, il ne se passe rien. Si on verse de l’eau chaude en revanche, le sucre se dissout. Et plus l’eau est chaude, plus la dissolution sera rapide et complète.
Le sucre, les arômes et le corps du café suivent cette même logique. Si on cherche la douceur dans notre recette, utiliser une température plus élevée est un bon outil, complémentaire de la taille de la mouture.
Je dis complémentaire car, de manière générale, la température a un impact subtil sur l’extraction. C’est à dire qu’à l’aveugle, une différence de 5°C peut être difficile à percevoir. Au-delà cela devient beaucoup plus flagrant d’un essai à l’autre.
Donc en résumé, plus l’eau est chaude, plus on va extraire, attention donc à ne pas aller trop chaud avec des torréfactions plus foncées, cela pourrait plus facilement ramener des arômes de tabac et de fumé indésirables.
Mais pourquoi l’eau extrait mieux lorsqu’elle est chaude ?
La première raison, c’est que comme ses atomes sont en mouvement grâce à l’énergie apportée par la chaleur, ils sont plus instables. Les transferts chimiques se font avec moins d’effort et donc en plus grande quantité.
La deuxième raison, un peu plus spécifique au café, c’est que plus l’eau est chaude, plus elle est… liquide.
Je m’explique : La viscosité de l’eau change avec la température. Plus elle est froide, plus elle se rapproche de son état solide donc plus elle sera “visqueuse” et l’inverse est aussi vrai.
Plus l’eau est chaude, moins elle est visqueuse, donc plus elle est liquide.
Ce fait apporte deux conséquences :
- L’eau se faufile entre les particules de mouture et à travers les mailles du filtre plus vite, accélérant donc le temps d’extraction.
- L’eau se faufile dans les particules de mouture (qui sont un milieu poreux, comme une éponge) plus facilement, accédant plus vite à tous les composés à extraire.
C’est donc pour ça qu’en plus d’extraire plus, une eau plus chaude extrait plus vite !
Attention donc si vous utilisez des cafetières à infusion type French Press ou Aeropress. Il sera sans doute nécessaire d’ajuster votre temps d’infusion de quelques dizaines de secondes si vous changez la température d’infusion.
Mais tant qu’à parler de température, sortons la tête de l’eau et allons voir l’impact sur l’extraction de la température de nos équipements.
La température des équipements
Vous avez sûrement déjà vu des baristas rincer leurs filtres avant l’infusion ou mettre de l’eau chaude dans leurs contenants avant de mettre le café pour “pré-chauffer” la cafetière.
Mais à quoi ça sert ?
Et bien la logique de cette étape, c’est que si notre contenant est déjà chaud, alors il n’absorbe pas la chaleur de l’eau utilisée pour l’infusion. On s’assure donc que l’eau reste au maximum à la température voulue.
C’est dans cette même logique que sur une machine à espresso, on garde toujours les porte-filtres enclenchés, pour conserver cette chaleur dans la chambre d’infusion.
D’ailleurs, quel est le meilleur matériau pour la conservation de la chaleur ?
Devinez ! Le verre ? La porcelaine ? Raté !
C’est le plastique.
Eh oui, le plastique, à épaisseur égale avec ses concurrents, a de bien meilleurs attributs thermiques que ses concurrents. voir cet article de Barista hustle sur cette question appliquée au V60 1
En complément de cette étude, on note aussi depuis quelques années l’apparition de cafetières à double paroi. L’air étant un très bon isolant, on améliore ici encore l’isolation thermique de notre cafetière par le même principe que le double vitrage, ou les bouteilles thermos.
Ce que ça signifie aussi, c’est qu’il est d’autant plus important de préchauffer ses cafetières avant usage.
La cafetière n’est d’ailleurs pas la seule source de perturbation thermique. La mouture en elle-même est une masse froide qui doit être mise à température ! C’est une des utilités annexes de la pré-infusion.
C’est pour ça que je disais plus haut qu’en réalité, même si on utilise de l’eau à ébullition dans la bouilloire, elle n’est jamais bouillante en infusant le café. Car dès sa sortie de la bouilloire, le contact avec l’air, puis la mouture, puis le contenant, vont faire baisser sa température.
Alors oui, on a déjà vu des baristas prendre en compte ces déperditions de chaleurs et utiliser plusieurs températures d’eau différentes à divers moments clefs d’une extraction… Mais ces techniques de profilages de températures sont extrêmement marginales et généralement réservées aux compétitions de cafés.
Quid de l’extraction à froid ?
Mais alors que se passe-t-il lorsqu’on infuse du café à l’eau froide ? et bien normalement maintenant la logique doit vous sembler limpide. On infuse plus longtemps.
En effet, pour le cold brew infusé à température ambiante (20°C) on infuse entre 6 et 12 heures selon le café et la mouture, alors que pour du cold brew infusé au frais (4°C), on infusera entre 12 et 24 heures.
Il faut bien penser que ces échelles de temps par rapport aux températures ne sont pas linéaires. C’est-à-dire qu’une augmentation de +5°C n’aura pas le même impact entre 65°C et 70°C qu’entre 90°C et 95°C et changent aussi en fonction de la minéralité de votre eau.
Voir cet article sur l’impact des différents minéraux sur l’extraction du café : 2
J’espère que les interactions de chaleurs dans le café sont maintenant plus claires pour vous, et que ces nouvelles connaissances en thermodynamique vous aideront dans votre quête vers le meilleur café !